Après plus d’un an de télétravail presqu’intégral forcé ou d’arrêt total de l’activité pour certains, se pose désormais la question du retour des collaborateurs sur site. Peu à peu, les entreprises préparent activement le retour au bureau et les salariés retournent sur site progressivement. Mais ce ne peut se faire comme si rien ne s’était passé. Cette reprise sous-entend des enjeux multiples et demande une réelle (ré)organisation.
Tandis que certains rêvent de retrouver leurs collègues, d’autres sont plus réticents à l’idée de retourner travailler en présentiel. Trois télétravailleurs sur quatre appréhendent même le retour au bureau et ne veulent pas y revenir « comme avant », selon une étude d’OpinionWay pour Empreinte Humaine.
On vous révèle donc 7 règles d’or pour mobiliser ses collaborateurs et les préparer au retour au bureau pour une reprise gagnante.
3 télétravailleurs sur 4 appréhendent le retour au bureau et ne veulent pas y revenir « comme avant ».
Baromètre T7, OpinionWay & Empreinte Humaine
Sommaire de l'article
Sortir d’une crise : un processus
Il va sans dire que l’année qui s’est écoulée fut très particulière, inattendue, remplie d’incertitudes mais aussi d’informations anxiogènes. Ce n’est sans équivoque pas la période la plus stable et sereine que l’on ait pu connaître au cours de notre vie. Qu’on l’ai bien vécue ou non, cette crise sanitaire nous a tous affecté d’une manière ou d’une autre.
Nous pourrions assimiler cette période que l’on a traversée à la « courbe du deuil » élaborée par le Dr Kübler Ross ; le choc se référant au jour où la décision du confinement fut prononcée.
Dans ce processus de résilience, une partie dépend de notre capacité à mobiliser nos ressources personnelles, une autre de notre perception de la situation et une autre dépend de l’environnement dans lequel on se trouve. Le processus est facilité si l’on se créé un environnement sain et bienveillant et que l’on peut partager et échanger sur ce qu’on a vécu.
Pourquoi certains salariés sont-ils réticents au retour au bureau ?
Le retour sur site peut être, dans certains cas, source d’appréhension, ce pour plusieurs raisons :
- La peur du virus et du risque de contamination sanitaire en revenant sur site ;
- La perte de l’autonomie, celle-ci ayant été possible grâce au télétravail intégral ;
- La crainte de retrouver certains collègues avec qui il y a pu avoir des tensions du fait du travail à distance ;
- Le retour des difficultés à équilibrer sa vie personnelle et sa vie professionnelle (scolarisation, garde d’enfants…) ;
- …
Cependant, le travail ne reprend pas « comme avant ». Il convient de réapprendre de nouvelles manières de faire son travail en sécurité et de favoriser le dialogue et la confiance à tous les niveaux.
Retour sur site : quels sont les enjeux ?
Les enjeux de la reprise sont multiples. Le ré-accueil des collaborateurs a un impact :
- Humain : sur le bien-être du salarié qui revient, celui de son équipe, de son manager. Il faut redonner confiance au salarié qui peut douter de sa capacité à retrouver la même productivité ou la même énergie qu’avant l’absence ou que pendant le télétravail. Il s’agit donc de faciliter cette reprise et de renouer les liens avec l’ensemble de l’équipe ;
- Organisationnel : l’organisation du travail de l’équipe n’est pas tout à fait pareil en télétravail et sur site. Le manager doit donner des objectifs clairs aux collaborateurs et les missions de chacun doivent être reprécisées ;
- Economique : sur la productivité, le coût d’un nouveau recrutement, la marque employeur.
Comment préparer le retour au bureau ?
1. Organiser le retour sur site en sécurité
Le retour sur site doit tout d’abord se faire en sécurité. Nous traversons toujours une période de crise sanitaire et certains appréhendent le risque de contamination. Il convient donc de continuer à respecter les gestes barrières et à sensibiliser les collaborateurs à ce propos. Pour ce faire, il vaut mieux :
- Prévoir un retour progressif des télétravailleurs en gardant quelques jours de télétravail par semaine pour chaque salarié qui le souhaite ;
- Adapter l’organisation du travail et les mesures de prévention dans les locaux : jauge, équipement de protection, distanciation… ;
- Être accompagné si nécessaire par le service de santé au travail ;
- (In)former et accompagner : sur les nouvelles mesures, les règles de distanciation et l’usage des équipements de protection sanitaire, former les managers pour qu’ils puissent accompagner la reprise en sécurité de leurs collaborateurs… ;
- S’assurer de l’affichage des consignes de prévention et de sécurité.
Pour les salariés qui ont dû totalement arrêter leur activité pendant longtemps, certains gestes et postures ont pu être oubliés. Il convient donc de les former de nouveau aux règles de sécurité de leur métier.
2. Pérenniser le télétravail (lorsqu’il est possible) en trouvant le juste équilibre
Certains salariés ont apprécié la possibilité de s’organiser comme ils l’entendaient, en toute autonomie. Le télétravail leur a apporté confort et flexibilité. Pour eux, le retour au bureau à 100% est synonyme de perte de liberté.
Pour d’autres en revanche, le télétravail intégral a pu être source de désorganisation et d’isolement. Dans ce cas, démotivation et désengagement se sont fait ressentir. Le rôle de l’entreprise est donc de trouver le juste équilibre au sortir de la crise sanitaire.
86% des salariés souhaiteraient télétravailler encore après la crise sanitaire.
Baromètre annuel télétravail 2021, Malakoff Humanis, 2021
Beaucoup de salariés souhaiteraient continuer à télétravailler et demandent un mode de travail hybride (alternance entre présentiel et télétravail). Mais pour intégrer le télétravail de façon pérenne, les entreprises doivent former leurs collaborateurs au télétravail et au management à distance ; car télétravailler, ça s’apprend.
Les dirigeants doivent tirer des enseignements de ce qu’il s’est passé durant la crise : tous les salariés ne se sont pas retrouvés sur le même pied d’égalité pour travailler depuis leur domicile au pied levé. Certains collaborateurs se sont retrouvés dans un environnement non propice, sans les bons outils et la bonne organisation. Si l’on estime que le télétravail deviendra la normalité dès demain, alors il est nécessaire d’organiser le télétravail et de former ses collaborateurs au travail à distance.
85% des DRH souhaitent le développement pérenne du télétravail. Un modèle alternant distanciel (télétravail) et présentiel (retour sur site) sera préféré au sortir de la crise.
Enquête de l’ANDRH
Un an après le début de la crise sanitaire et de la mise en place massive du télétravail, toutes les leçons peuvent être tirées, en termes d’avantages comme d’inconvénients, afin de faire du télétravail un pilier de la Qualité de Vie au Travail (QVT).
3. Sonder, écouter et rassurer
Exiger le retour au bureau sans prendre le temps de sonder et comprendre le ressenti des collaborateurs serait contre-productif. L’évaluation de l’état d’esprit de ses collaborateurs est nécessaire avant le retour sur site. De ce fait, un entretien professionnel individuel entre managers et managés peut être envisagé afin de créer un retour au bureau dans les meilleures conditions. Par ailleurs, l’entretien après une absence de longue durée d’un salarié est obligatoire. Cet entretien de retour est l’occasion pour le manager de :
- Sonder l’état d’esprit de chacun des membres de son équipe ;
- Savoir comment ses collaborateurs ont vécu la pandémie et le télétravail ;
- Comprendre de quelles manière chacun se projette dans son rôle, son équipe et son entreprise ;
- Cadrer la reprise du travail et partager ses attentes.
Un questionnaire d’autoévaluation peut également être envisagé au sein de l’entreprise afin de mesurer les réticences des salariés et la manière dont ils ont vécu le confinement.
Il convient également de rassurer les collaborateurs face aux appréhensions engendrées par la crise.
4. Accorder plus de place à la santé et au bien-être
La crise a rappelé aux entreprises à quel point la qualité de vie au travail (QVT) était essentielle pour la continuité d’activité. L’humain est au centre des préoccupations de l’entreprise : la santé individuelle, physique et mentale trouve une place centrale au cœur des problématiques organisationnelles. Ainsi, l’approche par la QVT constitue une voie pour préparer l’après-crise et sortir plus serein de l’enchaînement des confinements, couvre-feu et télétravail intensif. Il est aujourd’hui plus que jamais crucial que les dirigeants d’entreprise pensent la QVT comme un enjeu central de sécurité et de productivité.
Certaines entreprises accordent déjà une plus grande place à la santé de leurs collaborateurs, à l’instar de Carrefour qui a fait installer des cabines connectées pour que chacun puisse consulter un médecin à distance si nécessaire.
De même, la crise a poussé les employeurs à augmenter les budgets alloués au bien-être de leurs collaborateurs. De plus en plus d’entreprises font ainsi appel à des organismes pour prendre soin de leurs salariés : formation à la déconnexion numérique, conférence sur la gestion du stress, atelier de yoga des yeux, de cohérence cardiaque et j’en passe.
Si la crise nous a bien remis une chose en tête, c’est que la santé des salariés a un impact direct sur leur performance et celle de leur entreprise. Comme nous avons l’habitude de le dire chez Goalmap, un salarié en forme, c’est un salarié qui performe.
5. Préserver la qualité des relations au travail
Difficile de garder une bonne cohésion d’équipe lorsque les collaborateurs ne se voient jamais. Pire encore, certaines tensions ont pu surgir entre certains du fait du travail à distance et de la piètre communication que cela peut engendrer. Alors, pour retrouver la cohésion d’équipe et prévenir les tensions sur site, il convient de :
- Maintenir des temps d’échange réguliers et faciliter l’expression de chacun sur son travail et les difficultés éventuellement rencontrées ;
- Favoriser la coopération entre salariés à distance et sur site : projets en commun, tutorat…
- Désamorcer les tensions en amont grâce au dialogue et à la communication non violente ;
- Respecter le droit à la déconnexion.
6. Ajuster la culture managériale
Le télétravail transforme considérablement la fonction du manager et lui confère de nouvelles missions d’organisation, de contrôle et d’accompagnement auprès de son équipe.
La situation sanitaire a concentré le management sur l’essentiel de sa mission : comment entretenir et encourager l’engagement des équipes, tout en prenant soin de chacun. Dans un contexte où les liens sociaux au sein de l’entreprise ont tendance à se distendre du fait de l’éloignement physique, le manager joue un rôle pivot pour fédérer, pour assurer une transition des messages, une cohérence entre les différentes strates de l’entreprise, la direction et les collaborateurs.
Le rapport des salariés au management a changé. Désormais, les salariés souhaitent un management participatif fondé sur l’échange, l’écoute et la confiance plutôt qu’un management fondé sur le contrôle et le présentéisme. De même, la distance a également accéléré le statut de leader du manager en mettant en avant son rôle de coach auprès de ses équipes.
Ce sont toutes ces fonctions que le manager devra incarner ou continuer à incarner pour un retour sur site gagnant.
7. Préparer le futur et l’après-covid
La crise a sans équivoque renforcé voire fait naître des incertitudes quant à l’avenir pour toute une partie du monde du travail :
Près d’un salarié sur deux déclare être incapable de se projeter sur un plan professionnel.
Etude de l’IFOP
Ces incertitudes risquent de nuire à la sérénité des équipes de travail et appelle donc à des mesures de réassurance de la part des dirigeants. Comment faire ?
- Tester différentes façons de travailler à distance et sur site puis en évaluer les effets et procéder à des ajustements ;
- Poser les enjeux et les dimensions du télétravail dans la durée à l’aide d’une charte de télétravail : management, outils, temps de travail, télétravail régulier ou occasionnel… ;
- Former les managers au management à distance et les collaborateurs aux bonnes pratiques du télétravail ;
- Inscrire une démarche de qualité de vie au travail dans la culture d’entreprise avec une vision stratégique et un suivi dans le temps ;
- Pour les RH : adapter leurs pratiques (recrutement de profils plus autonomes, développement de nouvelles compétences comme la flexibilité…).
Pour résumer : les 7 règles d’or pour un retour sur site gagnant
La crise sanitaire du Covid-19 a révélé de profonds changements dans notre société et notre façon de vivre. Il y aura bien un avant et un après Covid et la reprise du travail ne peut pas se faire comme si rien ne s’était passé.
Dans une interview accordée au magazine Management, Patricia Wendling, DRH et auteure du livre « Télétravail, mode d’emploi » prévient : « Faire comme s’il ne s’était rien passé, c’est tourner le dos à l’avenir. Pour une entreprise, cela reviendrait à dire à ses salariés « J’ai bien noté que vous êtes restés productifs, j’ai bien vu qu’il y avait une amélioration de votre qualité de vie… mais j’en fait peu cas. » Ce serait une erreur. Et vis-à-vis des talents, on voit bien qu’aujourd’hui le mot télétravail est très recherché. Permettre ce mode de travail, offrir de la souplesse, sera demain le moyen d’attirer et de retenir les collaborateurs et les talents les plus recherchés. »
« Faire comme s’il ne s’était rien passé, c’est tourner le dos à l’avenir. Il s’est passé quelque chose et on a tous à en tirer des leçons. Et dans ces leçons-là, il y a des points qui pourraient nous faire avancer. »
Patricia Wendling, DRH et auteure du livre « Télétravail, mode d’emploi »
Pour résumer, voici les règles d’or pour un retour sur site gagnant :
- Etre irréprochable en matière de sécurité dans les locaux : gestes barrières, protections sanitaires, jauges… ;
- Trouver le juste équilibre entre travail à distance (lorsque cela est possible) et travail sur site : un grand nombre de salariés souhaitent continuer le télétravail. L’idéal serait d’adopter un modèle hybride en alternant télétravail et travail au bureau dans la mesure du possible ;
- Sonder l’état d’esprit de ses collaborateurs sous forme d’entretiens ou de questionnaires et les rasséréner en cas d’appréhensions ;
- Accorder une plus grande place à la prévention santé et au bien-être : une démarche QVT doit s’inscrire dans la durée car la santé des salariés doit plus que jamais faire partie des préoccupations majeures des dirigeants ;
- Préserver la qualité des relations au travail : l’absence de liens sociaux s’est fait cruellement ressentir lors des confinements à répétition et des tensions ont pu naître entre collaborateurs du fait du travail à distance ;
- Ajuster la culture managériale : le management fondé sur le contrôle et le présentéisme doit disparaître au profit d’un management fondé sur l’échange, l’écoute et la confiance ;
- Préparer demain : le travail ne sera plus jamais comme avant. Il convient de tirer des enseignements de cette crise et de préparer le futur.